JA Lens

« Nous avons collectivement besoin de l’Economie sociale et solidaire (ESS) pour faire face aux défis sociaux et environnementaux du 21^e siècle ». Co-initiateur il y a dix ans de la coopérative d’urbanisme transitoire Plateau Urbain dont il assure désormais la présidence du conseil de surveillance, Paul Citron s’est fait avec le temps un ambassadeurs de cette ESS dont il ne manque jamais de rappeler le poids macroéconomique : « 10 % du PIB de la France, 15 % des emplois du secteur privé, 2,6 millions de salariés et 30 millions de m² d’activités et de bureaux. Au total, c’est environ 5Md€ de loyer annuel payé par les structures de l’Economie Sociale ! ».

Tournés vers la production d’externalités positives, les acteurs de l’ESS ont naturellement une rentabilité moindre par rapport aux entreprises classiques et leurs dépenses de loyer apparaissent dès lors disproportionnées. Pour l’ancien directeur du développement de Plateau Urbain, « les projets d’urbanisme transitoire et d’immobilier solidaire sont de formidables vitrines, des laboratoires pour une ville de demain plus généreuse, mieux partagée, plus frugale, mais ces espaces ne suffisent pas à répondre aux immenses besoins immobiliers des acteurs de la transition écologique et sociétale. Dix ans après la création de Plateau Urbain, la démonstration de l’utilité de ces lieux hybrides a été faite, et il faut maintenant trouver les leviers pour massifier ces pratiques. » C’est ce qui a poussé Paul Citron à créer au printemps dernier Surface + Utile, une association qui s’est donné pour objectif de « promouvoir les espaces économiques de la transition », à différentes échelles et à prix décotés. « L’ESS a besoin de surfaces de bureaux et d’activités adaptés pour continuer à œuvrer en faveur de la transition. Alors qu’une crise immobilière se profile, ce sont des millions de mètres carrés que nous pourrions dédier facilement à ces acteurs d’intérêt écologique et sociétal», expliquait, à l’occasion de la dernière édition de la Nuit de l’action - Université de la Ville de demain, le docteur en Urbanisme et aménagement de l’université Paris 1. « On relève de nombreuses initiatives de la part des collectivités, des bailleurs sociaux, mais également des acteurs privés. Dans le cadre de son PLU bioclimatique, la Ville de Paris annonce le triplement des surfaces dédiées à l’ESS. Le stock progresse mais la démarche doit désormais être massifiée car nous constatons au quotidien l’ampleur de la demande. Par exemple, quand Plateau Urbain a lancé l’opération Césure (25 000 m² dédiés à l’ESS sur le site universitaire de Censier, à Paris), celle-ci a été six fois supérieure à l’offre. Aussi un parc immobilier abordable pourrait-il avoir des effets très puissants sur les capacités de financement et de recrutement de ces structures ».

Concrètement, Surface + Utile est un lobby qui a pour but de rassembler les acteurs de l’ESS, ceux de l’immobilier et les décideurs publics afin de mettre ces questions à l’agenda, de valoriser les bonnes pratiques et de proposer des solutions au sein de chaque territoire. « Il faut sortir d’une considération philantropique de l’ESS et voir les millions de salariés de ce secteur comme un amortisseur de crise », analyse Paul Citron. « C’est pourquoi notre association réunit des partenaires tels que BNP Real Estate, SNCF Immobilier, Novaxia, la SPL Marne au Bois, Plateau Urbain ou la foncière Bellevilles, tout en travaillant avec les têtes de réseau de l’ESS. Nos propositions sont variées : montages immobiliers ad hoc, modèle économique spécifique, incitations fiscales et réglementaires... Les leviers ne manquent pas pour massifier partout en France et en Europe les espaces économiques de la transition, qui proposent aux habitants des espaces d’engagement, de solidarité et de citoyenneté, et sont des supports indispensables à la transformation notre société, comme une sorte d’assurance sociétale ».