Patrick HENRY Patrick HENRY

©Sophie Brandstrom

Entre espoir et désenchantement… « Nous avons plus que jamais besoin de travailler sur la question des espaces communs », appelle l’architecte et urbaniste Patrick Henry. Et d’ajouter sur le même ton : « je ne sais pas si le projet urbain a encore un avenir. Mais si c’est le cas, il s’agirait de retrouver cette dimension d’intérêt général ». Et quel meilleur symbole de patrimoine commun ? Le sol ! Celui-là même qui a fait l’objet de son dernier ouvrage, publié début 2023 : Des tracés aux traces. Pour un urbanisme des sols1. Un sol encore trop souvent considéré comme un simple support à construction et autres aménagements. Un sol « dont on a perdu la mémoire », déplore-t-il. Un sol qui fait même l’objet d’un cours spécifique, que Patrick Henry délivre à l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Paris-Belleville où il dirige le diplôme de spécialisation et d’approfondissement en urbanisme (DSA architecture des territoires).

Son parcours universitaire, lui, l’a conduit à l’Ecole d’architecture de Paris Val de Seine. Il se souvient d’études « pas très théoriques mais avec un fort bagage de dessin et une culture du projet ». Il y validera son diplôme à partir d’un travail sur sa ville natale : Le Havre, « certainement pas étrangère à mon choix d’études », à travers « son passé de ville démolie et reconstruite, son histoire portuaire, son rapport au paysage, son ouverture sur la Manche et sur l’estuaire de la Seine ».

En 1993, alors âgé 26 ans, Patrick Henry rejoint l’équipe d’Alexandre Chemetoff. Le début d’une histoire au long cours : 19 ans. Les deux pieds sur le sol et l’espace public, que ce soit à La Courneuve, à Boulogne-Billancourt ou à Lyon, avant de gagner Nantes en 2000 où il se voit confier la tête du projet d’aménagement urbain de l’Ile de Nantes et ses 350 hectares. De sa décennie nantaise, il retient deux grands principes : un, « la nécessité d’avoir une maîtrise d’ouvrage engagée dans la fabrication du projet urbain. Aussi bien sur le plan politique - c’était le cas avec Jean-Marc Ayrault - que technique », sous l’égide de la Samoa. Il cite Laurent Théry, alors directeur général, et Stéphanie Labat ». Deux : « la question du réemploi et le fait de considérer l’existant comme le point de départ du projet et comme un élément structurant ». Une logique implacable en 2023, « mais nous sommes alors au début des années 2000 », distille-t-il.

L’architecte-urbaniste ne s’étend pas sur l’issue de son aventure au sein de l’agence Chemetoff qui marquera aussi la fin de sa période nantaise. Il se dirige alors vers l’enseignement - Ecole d’Architecture de Bordeaux puis Paris-Malaquais, avant Paris-Belleville - tout en fondant sa structure bien nommée Pratiques urbaines, en 2017. Un pied en amphi, un autre sur le terrain : « Je ne dissocie pas les deux ». Voilà qui mérite explication : « Le projet ne peut s’élaborer uniquement à partir d’un dessin, aussi séduisant soit-il ». Patrick Henry parle « conditions du projet, avec ses acteurs, processus, dialogues à prendre en compte ». Sans oublier le sol bien sûr, qui fait partie « des éléments méthodologiques, conceptuels et réglementaires qui déterminent les conditions du projet. Et c’est là que je fais le lien entre ma pratique et l’enseignement ». Avec, en revers de la médaille, une activité qui le conduit à participer de moins en moins aux concours. « Car à ce stade, la marge de manœuvre est très réduite ». Et de conclure : « pour moi, l’enjeu se situe vraiment dans la définition du programme, avant justement que les concours soient montés ». En partant du sol. Toujours.

 

 

> Commander Traits Urbains n°138/139 "Les 100 qui font la ville en 2023"

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Les 100 qui font la ville

Les 100 qui font la ville, un hors-série du magazine Traits Urbains