> Commander Traits Urbains n°138/139 "Les 100 qui font la ville en 2023"
« En 1970 il fallait que Guy Jullian, mon père, soit quand même sacrément visionnaire pour implanter l’aluminium sur le marché français, avec des solutions déjà personnalisées », soulignait Agnès Jullian dans le livre anniversaire des 50 ans de Technilum, entreprise de conception et fabrication de mobilier urbain d’éclairage. C’était l’époque du développement des stations du littoral languedocien dans le cadre de la mission Racine, une opportunité saisie par l’entrepreneur biterrois. Technilum met au point le « sans soudure » avec des assemblages mécaniques, y compris avec une colle bi-composant utilisée dans l’aéronautique, et se démarque par une série de projets iconiques : Les Fées de la Grande Motte, Les Diamants à Marseille, les Palmiers à Cannes, le Collier de perles à Nice…
En 1994, au décès brutal de son père, l’étudiante à Paris-Dauphine reprend les rênes de l’entreprise. Et va, à 24 ans, s’imposer dans le milieu industriel languedocien. Elle est aujourd’hui chevalier de la Légion d’honneur, membre des conseils d’administration de l'UIMM Occitanie (Union des industries et métiers de la métallurgie), du Syndicat de l’Eclairage ou du Conseil National du Design, et s’investit dans de nombreuses instances. Elle a aussi trempé son caractère dans le bain politique : vice-présidente du conseil régional Languedoc-Roussillon de 2010 à 2014, conseillère municipale d’opposition à Béziers de 2014 à 2020.
En 1999, déménagement à Lézigno, aux portes de Béziers, dans un ancien chai viticole où se regroupent les bureaux et les ateliers de production. En 2006 s’y installera l’Association Lézigno, créée par Agnès Jullian ; elle accueille des artistes en résidence et organise annuellement les « Heureuses Coïncidences », évènement autour de l'architecture, du paysage et de la ville. Un rendez-vous incontournable et apprécié du monde de la maîtrise d’œuvre.
Dans les années 2000, Technilum préconise l’accessoirisation de ses mâts afin de limiter les émergences et de mutualiser les services ; l’entreprise développe par ailleurs ses premiers luminaires LED. Dans les années 2010, le concept « Smart-in-Site » est mis au point : l’espace public est pensé comme un tout, au-delà de l’éclairage, en intégrant des services intelligents au sein de son mobilier. De la BNF Richelieu au plateau de Saclay, de Göteborg à Ottawa, ou encore de Jérusalem à NYC, l’entreprise qui s’était surnommée « petit poucet de l’éclairage » aligne les références et dispose d’ateliers de production, d’un bureau d’études et d’une unité de recherche intégrés.
« Aujourd’hui il ne s’agit plus seulement d’éclairer mais de valoriser, avec un niveau d’éclairement largement diminué et des technologies éprouvées pour une diminution de la consommation par 10 », précise Agnès Jullian. Solide sur ses objectifs, il lui arrive de confesser une émotion renouvelée à regarder les lampadaires fabriqués dans ses ateliers, mis en situation dans des cadres prestigieux ou des espaces dédiés au vivre ensemble.