Morgane NICOL Morgane NICOL

Dans un monde en souffrance, d’aucuns ont clamé qu’ils avaient pour « ennemi » la finance mais leurs intentions n’ont jamais dépassé le stade des déclarations. D’autres préfèrent défendre l’idée plus constructive d’une finance durable. Morgane Nicol est une jeune femme au parcours « atypique » : elle est diplômée de l’EDHEC - spécialité finance - et met son expertise au service du changement climatique. Et c’est très concret. « Lors de mon année de césure, j’ai travaillé neuf mois en tant que consultante free-lance auprès d’ONG intervenant au Bénin, en Côte d’Ivoire, en Bolivie, sur des programmes de microfinance durable ». S’ensuit une deuxième expérience de quatre mois au sein d’une ONG présente au Cambodge, où c’est cette fois la vente de crédits carbone qui l’occupe. « Je ne suis plus sortie de ces thématiques ».

Morgane Nicol intègre ensuite le département « médiation verte » du Crédit Agricole, puis l’Agence française de développement (AFD) où elle est notamment chargée de projets secteur privé énergie-climat. De 2014 à 2016, on la retrouve manager à Carbone 4, cabinet de conseil spécialisé sur la stratégie bas-carbone et l’adaptation au changement climatique. « Passionnée » et avec une appétence particulière pour la recherche non académique, Morgane Nicol pose enfin ses bagages à l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), think tank expert du financement de ce fameux changement climatique, dont il ne suffit plus d’avoir conscience et qu’il faut désormais prendre à bras-le-corps.

« Mais il n’y a pas de réponse type au changement climatique ni même une réponse type par territoire », précise Morgane Nicol qui anime une équipe de vingt-six personnes, en lien direct avec les décideurs des collectivités locales. « Nous sommes confrontés à un changement de paradigme : jusqu’à présent, nous pensions dans un monde dont le climat était globalement stable, et ce n’est plus le cas. Il faut donc adapter les projets. A quel degré ceux-ci vont-ils être impactés ? Comment procéder pour réduire cet impact ? Combien cela va-t-il coûter ? Et comment finance-t-on ? Or dans nos études nous nous rendons compte que le nœud principal n’est pas tant dans les instruments mais dans l’économie réelle et les systèmes d’investissement public. Chez I4CE, nous produisons donc des analyses sur la base de la stratégie nationale bas-carbone, nous procédons à des évaluations et nous les portons auprès des décideurs, les associations d’élus notamment, dans l’unique but d’objectiver le débat. En aucun cas, nous ne recommandons des choix. Nous sommes apolitiques ».

Une certitude : « il faut accélérer les dépenses climat ». A charge pour I4CE de convaincre car si une évolution est observable dans les débats en même temps qu’une réelle prise de conscience, Morgane Nicol concède que cette dernière est « très récente ». Néanmoins, elle se veut optimiste : « il y a des signaux positifs qui laissent à penser qu’il y a moyen de faire bouger les choses. Un tabou a déjà sauté, celui selon lequel l’adaptation au changement climatique nous dispenserait de réduire nos émissions. L’un ne va pas sans l’autre. L’effort est bien sûr important, il va nécessiter des arbitrages politiques forts mais il est possible et finançable. Nous ne sommes pas encore au niveau de l’ambition mais à l’heure de la mise en œuvre ». Pour que demain, le soi-disant « ennemi » devienne un allié sur qui compter.

> Commander Traits Urbains n°138/139 "Les 100 qui font la ville en 2023"

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Les 100 qui font la ville

Les 100 qui font la ville, un hors-série du magazine Traits Urbains